MLP et l’écologie

Marine Le Pen : un projet dangereux pour le climat

Le programme de la candidate du Rassemblement national en matière de lutte contre le dérèglement climatique aboutirait à augmenter les gaz à effet de serre, à pénaliser les ménages et à augmenter notre dépendance aux énergies fossiles importées.

Publié le 16 avril 2022 

Editorial du « Monde ». La nouvelle alerte lancée le 4 avril par les experts de l’ONU spécialistes du changement climatique et la crise énergétique provoquée par l’invasion de l’Ukraine par la Russie devraient faire du défi climatique un enjeu central du second tour de la présidentielle française. Sur ce sujet crucial, le programme de l’extrême droite fait preuve de carences abyssales. Le projet de Marine Le Pen réussit un tour de force : il risque d’augmenter les émissions de gaz à effet de serre de la France, de l’empêcher d’atteindre ses objectifs climatiques, de l’isoler en Europe, de coûter plus cher aux ménages, tout en augmentant notre dépendance aux énergies fossiles importées.

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Mme Le Pen a assuré, mercredi 13 avril, ne pas vouloir sortir de l’accord de Paris sur le climat. Les détails qu’elle a fournis et son programme indiquent au contraire qu’elle n’a aucunement l’intention de respecter la trajectoire climatique qui s’impose à la France dans ce cadre. L’idée d’un moratoire complet sur les énergies renouvelables – y compris le projet de « démonter » les éoliennes existantes – ne repose sur aucun scénario établi par les experts du climat.

Même en relançant le nucléaire le plus rapidement possible, la France est contrainte d’augmenter très rapidement sa production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et de limiter sa consommation. Refuser cette option, c’est condamner le pays à construire de nouvelles centrales à gaz pour produire de l’électricité.

Efficacité et justice sociale

Le coût d’une telle opération serait triple : une hausse de nos émissions de gaz à effet de serre, une plus grande dépendance au gaz importé – alors que l’Union européenne cherche justement à se libérer des sources d’énergie russes – et une augmentation des factures payées par les ménages. Enfin, la volonté de sortir unilatéralement du marché européen de l’électricité aurait des conséquences majeures pour la France : il s’agit en réalité d’une ébauche de sortie de l’UE qui ne dit pas son nom.

La baisse de la TVA sur l’essence promise par la candidate d’extrême droite aurait pour effet de creuser le budget de l’Etat de 12 milliards* d’euros et d’encourager l’usage des énergies fossiles importées. Comme cette taxe est payée par l’ensemble des ménages, les plus aisés comme les plus précaires, la mesure n’est en rien redistributive, alors que cet aspect doit être au cœur de la transition énergétique. C’est une question d’efficacité et de justice sociale.

 

Autre sujet crucial : Marine Le Pen s’oppose à l’interdiction de la location des « passoires thermiques » à partir de 2025 – la France compte pourtant près de 5 millions de ces logements mal chauffés et très émetteurs de CO2. Un cadeau pour les propriétaires bailleurs qui ne souhaitent pas engager de travaux, mais une catastrophe pour les millions de ménages concernés, qui continueront à payer d’importantes factures d’énergie tout en étant mal protégés du froid l’hiver. Le logement est, après le transport, le deuxième poste d’émissions de gaz à effet de serre en France.

Les nombreuses insuffisances de la politique d’Emmanuel Macron en matière de climat font que la France, à l’issue de son quinquennat, n’est pas sur la bonne trajectoire de l’accord de Paris. Mais le projet de Mme Le Pen comporte des risques autrement plus conséquents : par ses incohérences, ses zones grises et son soutien affirmé aux énergies fossiles importées, le programme de l’extrême droite aboutirait à un recul dramatique, au moment où les experts de l’ONU appellent à des mesures immédiates pour « garantir un avenir vivable ».

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Le Monde

*  12 milliards: Cette estimation est largement discutable, les sommes récoltées par l’Etat dépendent du prix du brut, plus celui-ci est élevé, plus la recette fiscale augmente.  Il aurait été plus honnête de rire comment ce chiffre de 12 milliards  a été obtenu.  Ensuite la baisse des carburants n’encouragerait pas à ce que les acteurs économiques dans leur ensemble  (ménages, entreprises, administrations publiques) se tournent vers les énergies renouvelables, mais de là à dire qu’une telle baisse entrainerait une augmentations des énergies fossiles importées…

PS: je me suis permis de mettre en gras certains propos qui m’ont paru important de mettre en avant.