Les nazis et l’argent

Les Nazis et l’argent” sur Arte.tv : “L’Allemagne de Hitler était dans une course à l’argent permanente”

Pierre Ancery, Télérama, publié le 09/02/21 mis à jour le 11/02/21

A voir ou revoir jusqu’au 2 octobre 2022 sur LCP replay

https://lcp.fr/programmes/les-nazis-et-l-argent-au-coeur-du-iiieme-reich/les-nazis-et-l-argent-episode-2-une

ou disponbile sur arte boutique en VOD.

 

Comment une partie de l’humanité, les juifs en premier lieu, les slaves et tous ceux considérés comme sous-hommes par l’idéologie nazie, est réduite à l’état de matière première au même titre que des denrées comme le blé ou le pétrole, une donnée brute dans une équation économique.    Les couches populaires, peu ou pas diplômés, sont souvent considérés comme le vivier de l’Extrême droite comme il le fut du nazisme, mais dans ce documentaire on s’aperçoit combien des gens très instruits et cultivés avec diplômes universitaires participent activement la politique nazie et ses ressorts antisémites et criminels.

« Les nazis et l’argent » n’est pas un documentaire de plus sur la période et le nazisme.  Un autre regard y est développé et des clichés sur la soi-disant réussite économique nazie y sont décortiqués et réfutés par les faits.   L’Allemagne nazie s’est construite sur la dette et la spoliation des juifs et autres populations jugées indésirables (Slaves, Rooms, LGBT, communistes….) en premier lieu et le pillage systématique  des pays occupés.  Ac

Hitler entouré de dignitaires nazis

Hitler entouré de dignitaires nazisa

Dans le passionnant documentaire “Les Nazis et l’argent : au cœur du IIIe Reich”, le réalisateur Gil Rabier aborde l’histoire de l’Allemagne hitlérienne sous le prisme de son économie. Entretien.

Lorsqu’il accède au pouvoir en 1933, Hitler est à la tête d’un pays sans armée, dévasté par le chômage et à l’économie exsangue. Comment l’Allemagne, à bout de souffle, a-t-elle pu semer la désolation dans toute l’Europe six ans plus tard ? Dans un film formidablement documenté, le réalisateur, Gil Rabier, met en évidence les ressorts économiques d’un projet guerrier incluant de façon systématique le pillage, la spoliation, le travail forcé et le meurtre de masse.

Pourquoi vous être intéressé à la dimension économique de l’histoire de l’Allemagne nazie ?
Comme la plupart des gens, j’avais auparavant une vision un peu sidérée de cette période, avec l’image d’Épinal d’un pays puissant, quasi imbattable. Mais en me penchant sur les travaux d’une nouvelle génération d’historiens (Adam Tooze, Richard Overy…), j’ai découvert que l’Allemagne était en réalité une puissance moyenne, comparable à l’Afrique du Sud ou l’Iran aujourd’hui. Or c’est cette puissance moyenne, constamment aux abois, qui va déclencher une guerre mondiale. Tirer le fil de l’argent, c’est une manière de questionner cette histoire.

Les nazis ont-ils inventé le management ?

Vous battez en brèche l’idée de « miracle économique » en montrant que les choix économiques de Hitler sont indissociables de son projet meurtrier.
On entend parfois cette idée que, malgré leurs crimes horribles, les nazis ont sorti l’Allemagne d’une période de crise épouvantable. Ils ont remis en route l’économie, c’est vrai, mais en créant un système qui ne fonctionne que par le déclenchement de la guerre, car les déséquilibres sont tels qu’ils ont besoin d’aller voler des richesses à l’Ouest puis à l’Est. Ils sont dans une course à l’argent permanente, une fuite en avant financière, industrielle, marquée par la restructuration de toute la société autour du projet nazi – c’est-à-dire éliminer les Juifs et faire la guerre.

Est-ce l’idéologie qui a commandé à l’économie, ou l’inverse ?
C’est un cercle. Les nazis avaient une idéologie très puissante qu’ils ont fait dialoguer avec les réalités économiques. Ainsi pendant la guerre à l’est, la question du génocide, qui est évidemment au cœur de leur idéologie, se confronte au fait qu’ils n’arrivent plus à nourrir l’armée. Alors ils vont affamer les « bouches inutiles », cette population locale souvent d’origine juive. La mort devient un moyen et une fin, et d’une certaine manière, les nazis tuent les Juifs plusieurs fois : parce qu’ils sont juifs, mais aussi parce qu’ils ont besoin de récupérer de la nourriture.

Est-ce que cette imbrication de l’économie et de l’idéologie est théorisée par les nazis ?
Oui. Les nazis ont créé leur propre rationalité économique, qui est profondément abjecte mais qui est cohérente. On va avoir des ingénieurs et des planificateurs qui réfléchissent à la façon dont on va faire mourir les travailleurs esclaves, mais pas trop vite pour qu’ils soient suffisamment productifs. C’est la rencontre d’un cynisme inimaginable entre une idéologie et des techniques de management.

Ce régime a détruit la culture européenne et radicalisé ce qu’elle avait de pire en elle.”

Pour évoquer l’envoi de civils allemands dans les territoires conquis à l’est, vous parlez de colonialisme, une notion qui n’est pas souvent associée au nazisme.
Il faut comprendre que c’est un régime qui a, à la fois, détruit la culture européenne et radicalisé ce qu’elle avait de pire en elle. Vous trouvez dans le nazisme les idées les plus terrifiantes du XIXe et du XXe siècles : l’antisémitisme, le darwinisme social, l’eugénisme… et le colonialisme. Le dernier projet colonial européen, il est nazi et il concerne l’Est. C’est un projet planifié, très pensé, théorisé, avec l’idée que la supériorité technique des Allemands justifie l’arrivée de colons et la mise en famine de 30 millions de personnes dites « inférieures ».

Ce modèle économique, fondé sur la mort, est-il unique dans l’Histoire ?
À partir du moment où on voit qu’il y a une pensée de l’utilisation économique de la mort – c’est-à-dire qu’à l’époque, ce qui s’échange en Allemagne, c’est la mise à mort des gens contre la possibilité de continuer à fabriquer des armes –, je ne vois pas trop de comparaison dans l’Histoire. Ce qui est étonnant, c’est de constater que les dernières victimes de ce système, ce sont les Allemands eux-mêmes. À la fin de la guerre, alors que tout est perdu, le régime anticipe la famine de son propre peuple en utilisant tout l’azote dont il dispose pour fabriquer des munitions au détriment de l’agriculture à venir. Si bien qu’en 1946, le peuple s’est retrouvé face à une agriculture privée d’engrais. L’aboutissement de cette logique de mort, c’est l’autodestruction.
Pierre Ancery

Regardez “Vie et destin du Livre noir”, l’épopée tragique de l’anéantissement des Juifs de l’Est par les nazis, en replay sur france.tv

Marie-Hélène Soenen

7 minutes à lire

À voir
on aime beaucoup Les Nazis et l’argent : au cœur du IIIe Reich, documentaire de Gil Rabier (France, 2021). 100 mn. Inédit. Disponible en vidéo à la demande sur Arte.tv et actuellement sur LCP

 

DOCUMENTAIRE 

LES NAZIS ET L’ARGENT – ÉPISODE 2 UNE ÉCONOMIE DE LA MORT 

A voir ou revoir jusqu’au 2 octobre 2022 sur LCP replay

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45 MINUTES

Les éclatantes victoires allemandes de 1940 cachent une économie aux abois. Tout manque, l’essence, les armes, les matières premières, la nourriture, les devises : un immense pillage s’organise dans les pays envahis, l’économie de guerre nazie est une économie du vol et de la spoliation.
Elle va devenir peu à peu une économie de la prédation.
Le meurtre des populations juives, le terrible projet au coeur du national-socialisme, reste prioritaire, mais il doit s’adapter aux urgences du manque de nourriture et du manque de main-d’oeuvre.
Les nazis parviennent à articuler leurs obsessions idéologiques meurtrières avec les nécessités de la production d’armement. Les nazis calculent, planifient, transforment l’être humain en chose, taillable et corvéable à merci. La production industrielle s’adapte. La mort fait partie de l’équation. Cette alliance solide entre les pires éléments du régime et les ingénieurs de l’industrie de l’armement forment un système économique effroyable qui permet au régime hitlérien de continuer le combat jusqu’à l’effondrement du pays.

Juin 1940 : Hitler lance ses troupes blindées contre la France, la Belgique et la Hollande. Pourtant, l’Allemagne n’a plus d’argent, peu de matières premières, pas de pétrole et pas de devise. Comment les nazis ont-ils pu, sans argent et à la tête d’une économie faible, déclencher ce cataclysme que fut la seconde guerre mondiale ?

En s’appuyant sur les travaux d’une nouvelle génération d’historiens, ce film, par son approche économique, industrielle et financière de la période du IIIème Reich, nous plonge au coeur du système nazi grâce à des figures historiques clés tombées dans l’oubli (Hjalmar Schacht, Dr. Georg Von Schnitzler, Fritz Sauckel, Erich Müller…).

Aux côtés d’historiens de renom, grâce à des animations 3D et à une approche inédite des archives – pour certaines peu exploitées – ce film révèle comment les nazis sont parvenus à structurer, à insérer leurs idées racistes et violentes dans tous les pans de l’économie allemande – de la grande industrie au petit commerce en passant par l’agriculture, la recherche et la finance – jusqu’à créer un « modèle » économique dont les principaux outils de gestion étaient le vol et le meurtre de masse, et dont l’objectif ultime était la guerre et la destruction de l’Europe.