Pacte sur les migrations: crise en Belgique

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Le pacte sur les migrations provoque une crise dans le gouvernement belge

Par RFI

Belge

Le leader du N-VA, Bart de Wever lors d’une conférence de presse le 8 décembre à Bruxelles.THIERRY ROGE / POOL / AFP

Le Premier ministre belge Charles Michel a proposé samedi 8 décembre de remplacer les ministres nationalistes flamands de la N-VA au sein du gouvernement après un ultimatum de ce parti, qui s’oppose à ce que la Belgique approuve le pacte de l’ONU sur les migrations. Un conseil des ministres extraordinaire s’est tenu samedi soir à Bruxelles.

La crise au sein du gouvernement belge autour du pacte de l’ONU sur les migrations s’est encore aggravée samedi 8 décembre au soir. Les nationalistes flamands de la N-VA ont laissé entendre qu’ils pourraient partir si le Premier ministre persistait à vouloir approuver le texte.

« Si on n’a plus de voix dans ce gouvernement (…) ça ne sert à rien de continuer », a lancé samedi le président de la N-VA, Bart De Wever, lors d’une conférence de presse. Si le Premier ministre part dimanche au Maroc pour approuver ce pacte, il « décollera comme Premier ministre de la suédoise (le nom donné à la coalition actuelle, Ndlr) et atterrira comme Premier ministre de la coalition Marrakech », a prévenu Bart De Wever, laissant ainsi planer l’hypothèse d’un gouvernement sans N-VA.

Le Premier ministre Charles Michel lui a répondu lors d’une conférence de presse. « Je prends (…) acte ce soir que la N-VA quitte la majorité » et « je vais (…) proposer que deux secrétaire d’Etat remplacent les trois ministres N-VA afin de garantir la continuité et le bon fonctionnement de nos institutions », a-t-il avancé. « Je prendrai (…) l’avion demain comme chef de gouvernement d’une coalition responsable (et) je mènerai bien sûr dès mon retour des consultations avec le Parlement », a déclaré Charles Michel.

Résolution de soutien

Les deux conférences de presse de M. De Wever et de M. Michel font suite à un conseil des ministres extraordinaire à Bruxelles, destiné, sans succès, à trouver une issue à cette crise politique. La N-VA est le seul des quatre partis de la coalition gouvernementale à être opposé à ce pacte, qui doit être approuvé lundi et mardi par les pays de l’ONU avant d’être ratifié à l’occasion d’un vote à New York le 19 décembre à l’Assemblée générale des Nations Unies.

La crise, latente depuis plusieurs semaines, a éclaté mardi soir, quand Charles Michel a annoncé son intention de se tourner vers le Parlement, faute d’unanimité au sein du gouvernement en faveur du pacte. Après deux jours de débats houleux à la Chambre des députés, une large majorité droite/gauche – isolant la N-VA au côté du parti anti-immigration Vlaams Belang – s’est dégagée jeudi pour voter une résolution demandant au gouvernement de soutenir le pacte.

Consensus avorté

Le gouvernement a souvent tangué depuis quatre ans en raison des prises de positions jugées radicales de la N-VA sur le dossier de la migration. Mais jamais au point de chavirer. Le pacte avait d’abord fait l’objet d’un consensus gouvernemental cet été, avant que la N-VA ne change d’avis fin octobre dans le sillage des critiques exprimées par le chancelier autrichien Sebastian Kurz.

Non contraignant, le pacte de l’ONU recense des principes – défense des droits de l’homme, des enfants, reconnaissance de la souveraineté nationale – et une vingtaine de propositions pour aider les pays à faire face aux migrations. Plusieurs pays de l’Union européenne, surtout d’Europe de l’Est, ont déjà décidé de s’y opposer.

Des législatives anticipées en perspective ?

La Belgique sera-t-elle gérée par un gouvernement minoritaire, composé des libéraux francophones, des libéraux flamands et des chrétiens démocrates flamands, mais sans la N-VA, interroge notre correspondante à Bruxelles, Joana Hostein. Ou bien le Royaume se dirige-t-il vers des élections législatives anticipées ? Une option qui parait peu probable vu que les électeurs doivent déjà voter au mois de mai, pour renouveler les membres de la Chambre des représentants.

Longue dissension sur l’immigration

Ce n’est pas la première fois que les questions migratoires sont source de tensions au sein du gouvernement belge. Il y a d’abord eu l’affaire des migrants soudanais expulsés vers leur pays d’origine et qui auraient été torturés à leur retour. Le Premier ministre belge avait alors annoncé le gel de ces expulsions le temps d’une enquête. Une décision qualifiée d’« absurde » par les ministres nationalistes flamands.

Autre dossier, les visites à domicile pour arrêter les migrants en séjour irrégulier. Un projet porté par les ministres de la N-VA, qui a suscité beaucoup de critiques au sein même de la coalition gouvernementale.

Aujourd’hui, le pacte sur les migrations de l’ONU est qualifié de « porte ouverte à l’afflux de migrants clandestins » par l’Alliance néo-flamande. La N-VA s’est toujours montrée très ferme sur les questions migratoires. Elle a donc choisi de durcir le ton, quitte à démissionner du gouvernement, en vue des élections législatives de mai prochain. Une stratégie pour capter l’électorat d’extrême droite lors du prochain scrutin.