Netanyahou face au risque de l’isolement diplomatique

Netanyahou face au risque de l’isolement diplomatique avec les pays occidentaux

Jeudi 2 février 2023, France Inter, 8h15

A écouter (3 mn) avec le lien:

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/geopolitique/geopolitique-du-jeudi-02-fevrier-2023-9070138

Le premier ministre israélien est jeudi soir à Paris pour rencontrer Emmanuel Macron ; mais Israël s’inquiète d’un possible froid avec les États-Unis et l’Europe en raison du programme de la coalition avec l’extrême-droite qui vient de s’installer au pouvoir.

Peut-on encore parler à Benyamin Netanyahou ? La question du dialogue avec des personnalités sulfureuses se pose régulièrement : par exemple avec Vladimir Poutine ? Par le passé, l’Autriche a été mise en quarantaine pour avoir pactisé avec le dirigeant d’extrême-droite Joerg Haider…

Personne n’a encore osé appeler au boycottage de Benyamin Netanyahou, et il arrive d’ailleurs ce soir à Paris pour des entretiens avec Emmanuel Macron. Et pourtant, les dirigeants politiques avec lesquels il a bâti la coalition au pouvoir en Israël font passer les ténors de l’extrême-droite européenne pour de pâles centristes.

En Israël, la question inquiète par avance. Le gouvernement cherche à désamorcer le possible isolement diplomatique produit par le virage pris par l’État hébreu… Les premières semaines du nouveau pouvoir montrent qu’un avis de tempête est signalé sur cette région. A la fois en raison de la flambée de violence qui a fait en janvier des dizaines de morts, israéliens et palestiniens ; mais aussi des menaces à la démocratie israélienne elle-même.

Signe d’un changement d’époque, les pays arabes du Golfe qui ont établi des liens avec Israël ferment les yeux sur la question palestinienne : leurs liens sécuritaires avec Israël sont plus importants. Mieux, Mahamat Deby, le Président du Tchad, un pays musulman d’Afrique centrale, était hier à Jérusalem, et a annoncé l’ouverture d’une ambassade dans l’état hébreu.

Un contraste avec la rencontre, en début de semaine, avec le Secrétaire d’État américain Anthony Blinken, venu appeler au calme après la flambée de violence des jours précédents. Blinken représente une administration démocrate, et Netanyahou n’a jamais caché son hostilité à ce parti, surtout du temps de Barack Obama.

Face à la presse, flanqué de Netanyahou à ses côtés, Blinken a exprimé une mise en garde à peine voilée contre toute régression démocratique en Israël, et a condamné le développement de nouvelles colonies en Cisjordanie. Et pour enfoncer le clou il a passé un long moment avec les représentants de la société civile que Netanyahou considère comme des « ennemis ».

Cela peut-il infléchir la politique israélienne ? C’est peu probable, car Benyamin Netanyahou et sa coalition sont embarqués dans une démarche idéologique qui pourrait changer la nature de l’État hébreu ; ils ne se laisseront pas bousculer de l’extérieur, même par Washington.

C’est plus net encore avec l’Europe, si elle s’avise de faire connaître ses désaccords. D’autant que Netanyahou a une carte importante en main, avec l’Iran, comme l’a montré le raid de drones israéliens sur une usine militaire le weekend dernier. L’impasse actuelle avec l’Iran renforce la position de Netanyahou, qui a toujours été hostile à tout accommodement avec Téhéran.

Le grain de sable dans la posture du dirigeant israélien, c’est le risque d’une explosion des Palestiniens, oubliés de tous, et que l’absence du moindre espoir conduit vers la violence. Les alliés occidentaux d’Israël peuvent-ils dire le droit en Ukraine et l’ignorer en Palestine ? La question du niveau des relations avec Israël peut dès lors se poser : pourra-t-on encore parler à Benyamin Netanyahou si sa coalition donne le coup de grâce à toute perspective de paix ?