MLP: « priorité nationale »

En Moselle, Marine Le Pen défend la « priorité nationale »

En déplacement à Hayange, jeudi, la candidate du RN à la présidentielle a soutenu que le logement social devait être « réservé d’abord aux Français en difficulté ».

Par , Le Monde

Publié le 24 septembre 2021 à 04h00 –  Temps deLecture 4 min.
Marine Le Pen en visite sur le marchŽ de Hayange
Marine Le Pen, candidate du Rassemblement national à l’élection présidentielle de 2022, en visite à Hayange (Moselle), le 23 septembre. MATHIEU CUGNOT / DIVERGENCE POUR « LE MONDE »

 

Le déplacement de Marine Le Pen en Moselle, jeudi 23 septembre, consacré à « la priorité nationale », a été un peu bouleversé par les révélations du Monde le même jour concernant les frasques de son directeur de campagne, Christophe Bay. Alors préfet de Dordogne, celui-ci avait été démis de sa fonction à l’été 2016, après deux rapports de l’inspection générale de l’administration (IGA) qui faisaient état de dépenses indues, notamment d’achat de whisky, sur des deniers publics. Un troisième rapport de l’IGA, sur des soupçons d’agressions sexuelles, avait été transmis au procureur de Paris, qui avait classé l’affaire.

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« J’ai pris connaissance des allégations stupéfiantes du journal Le Monde, a immédiatement réagi Christophe Bay dans un communiqué. J’ai demandé à mon avocat de déposer les plaintes nécessaires. » Marine Le Pen, à qui il était demandé si l’affaire remettait en cause la place de son directeur dans la campagne, a répondu : « En aucun cas. Ce type d’article ordurier, j’ai quarante ans d’expérience dans ce domaine. Je connais Christophe Bay depuis six ans, je n’ai absolument jamais vu ni de près ni de loin le moindre agissement du type de ceux qui font l’objet de ce papier diffamatoire, pour lequel d’ailleurs Christophe Bay va immédiatement porter plainte avec constitution de partie civile pour diffamation. » Elle y est revenue dans l’après-midi en mettant en avant « la présomption d’innocence » de son directeur de campagne, sans vraiment indiquer si elle connaissait son passé préfectoral.

« Avant tout une mesure sociale »

En fin de matinée, Marine Le Pen avait parcouru le dense marché d’Hayange (Moselle), 16 000 habitants, en se prêtant volontiers aux selfies d’une population largement acquise, aux côtés de Fabien Engelmann, le maire Rassemblement national (RN), réélu à plus de 63 % des voix au premier tour en 2020. Quelques militants de La France insoumise ont crié qu’elle était « contre l’augmentation du smic, contre l’ISF, contre vos intérêts, messieurs dames », avant d’être vite avalés par la foule, qui l’appelle déjà « présidente ».

La candidate à l’Elysée y prend un plaisir évident et a superbement ignoré la contrôleuse de bus qui lui a signalé en grinçant que « le port du masque est obligatoire, merci. Ça veut représenter les Français et c’est même pas capable de respecter les règles ». La députée s’essaie désormais aux déplacements thématiques, pour « aller à la rencontre directe des Français ». Elle a ainsi rencontré trois femmes dans un appartement HLM de Metz, une quatrième étant empêchée. La visite était à huis clos, seule Marine Le Pen en a fait un bref compte rendu.

La « priorité nationale » (plutôt que la « préférence nationale ») est pour Marine Le Pen « avant tout une mesure sociale », qu’elle entend inscrire dans la Constitution et qui porte d’abord sur le premier poste de dépense des Français : le logement. « Le logement social étant financé par les Français, a dit l’ancienne présidente du RN, il est logique qu’il soit réservé d’abord aux Français en difficulté. »

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Elle assure que, selon les chiffres du ministère de l’intérieur, les ménages immigrés sont deux fois plus souvent locataires d’un HLM que les autres : « En 2017, 31 % des immigrés sont logés en HLM, contre 13 % des Français. » L’étude du ministère (« Le logement des immigrés vivant en France », 2020), ajoute, ce que ne fait pas Marine Le Pen, que « la surreprésentation des immigrés dans les logements HLM peut être liée à leurs plus faibles revenus, mais aussi à la plus grande taille de leur ménage ».

Une seule condition : « Avoir la nationalité française »

La priorité nationale – Marine Le Pen en parle depuis 2013, et elle entend la soumettre à référendum – « s’appliquera à l’ensemble des Français »« La condition pour bénéficier de la priorité nationale, a-t-elle répété, c’est d’avoir la nationalité française. » Elle ne s’appliquera pas « en fonction des origines ou je ne sais quoi » – « tous les Français doivent pouvoir en bénéficier » pour le logement ou l’emploi.

Elle a indiqué que la préférence nationale pour l’emploi était appliquée en Suisse depuis 2014, comme dans la Constitution monégasque. « Même chez nous, la priorité nationale existe, a insisté Marine Le Pen. L’exercice de certains métiers est soumis à des conditions de nationalité : la fonction publique, en particulier la police, la justice, les militaires, les avocats, les débits de tabac – même si certains emplois ont été ouverts aux citoyens de l’Union européenne. » Et, en 1990, la coalition RPR-UDF avait adopté un projet où certaines prestations sociales étaient réservées aux nationaux – une plate-forme signée par Alain Juppé, François Bayrou ou Nicolas Sarkozy – « mais aucun d’entre eux n’a tenu parole ».

La mesure est interdite en France. Marine Le Pen en a profité pour trouver « éminemment scandaleuses » les poursuites contre Steeve Briois, le vice-président du RN, qui avait préfacé un guide des élus municipaux sur ce thème. La candidate entend persister : « Je le fais devant vous, sans masque, sans complexe, sans inquiétude. Je n’admettrai pas qu’une candidate à la présidentielle soit intimidée par des magistrats qui entendent censurer le débat politique. »

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