Lula, lendemain difficile?

Deuxième tour des élections présidentielles au Brésil : pourquoi Lula perd du terrain

25 oct. 2022

Par Marie Van Cutsem, Anne Vigna, Anne Poncelet, RTBF

Brésil Lula candidat 2022

Dimanche prochain, les Brésiliens vont voter pour choisir leur président. Entre le président sortant, Jair Bolsonaro, et le leader de la gauche, Lula. AFP

Dimanche prochain, le 30 octobre, les Brésiliens iront choisir leur président. Un combat entre le président sortant, Jair Bolsonaro, et le leader de la gauche, Lula, lui-même ancien président durant deux mandats.

 

Lula est toujours en tête, mais le président sortant le talonne, à quelques points. Au premier tour, le 2 octobre, Luis Inacio Lula da Silva a remporté 47,97% des voix, devant Jair Bolsonaro, à 43,60%. Aujourd’hui, les sondages maintiennent Lula en tête mais avec un écart qui diminue.

Cela pourrait donner un résultat très serré, source de contestations en justice, comme Jair Bolsonaro a toujours menacé de le faire.

Des aides aux plus démunis, pour faire pencher la balance ?

Le deuxième tour s’annonce donc plus difficile pour Lula, ce qui inquiète son équipe de campagne.

La remontée du président sortant est finalement assez spectaculaire et elle a été très rapide.

« En fait, il y a deux phénomènes en cours », analyse la correspondante de la RTBF au Brésil, Anne Vigna. « D’abord, il y a les aides sociales massives que le gouvernement de Jair Bolsonaro a distribuées depuis le mois d’aoûtEn deux mois, ces aides ont amélioré la situation des familles les plus précaires », des familles qui se tournent a priori vers Lula. Mais il pourrait y avoir une sorte de reconnaissance ».

Ces aides n’étaient pas autorisées durant la période électorale, mais comme le Tribunal supérieur électoral est déjà extrêmement critiqué par les bolsonaristes, les juges ont préféré ne rien faire.

La religion pour diaboliser l’adversaire

L’autre phénomène concerne la religion. Jair Bolsonaro et son épouse, Michelle Bolsonaro, font le tour des temples évangéliques depuis quatre ans. Aujourd’hui ils ont reçu l’aide de nombreux pasteurs très médiatiques, qui ont à la fois des millions d’abonnés sur les réseaux sociaux et qui possèdent aussi des télévisions ou des radios. Et la compagne du président a mis sur pied une stratégie redoutable à base de fake news, de fausses informations.

Il s’agit de répéter que le Parti des travailleurs est le diable.

Il s’agit de répéter que le Parti des travailleurs est le diable, c’est vraiment comme ça qu’il est présenté. Lula est désigné comme un suppôt de Satan, celui qui va fermer les temples, favoriser l’avortement et la légalisation des drogues. Et cette campagne a donné d’excellents résultats puisque le score que réalise Jair Bolsonaro chez les évangéliques a encore augmenté dans le dernier sondage qui est sorti cette semaine dans le Datafolha.

Quelle réaction chez Lula ?

En matière de religion, la réaction est complexe puisque la gauche a coupé les ponts avec cette partie de la population il y a déjà bien longtemps. La semaine dernière, Lula s’est finalement décidé à publier une lettre ouverte aux évangéliques pour réfuter les fausses accusations.

Lula, par contre, est le favori chez les catholiques, qui représentent encore la majorité de la population. Il devrait le rester : les militants bolsonaristes ont attaqué des prêtres pendant cette campagne.

Pour la question des aides sociales, Lula ne peut pas faire grand-chose parce que lui-même est très favorable à distribuer des aides sociales aux familles les plus pauvres, mais il tente de rappeler le désastre qu’a été la gestion de la pandémie par Jair Bolsonaro, l’isolement international dans lequel se trouve aujourd’hui le Brésil, à cause notamment de la politique écologique du président sortant et de la destruction de l’Amazonie.

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Un résultat serré, terreau idéal pour une contestation de Bolsonaro

Un score serré est le pire scénario envisagé par les défenseurs de la démocratie. Cela augmente le risque de contestation de la part de Jair Bolsonaro. Pour l’instant, il est impossible de prédire la réaction du président parce qu’il est lui-même imprévisible.

En tout cas, la communauté internationale est très attentive à ce qui va se passer dimanche. De nombreux observateurs internationaux étaient déjà présents au premier tour. Il faut rappeler qu’à la différence d’autres pays d’Amérique latine, comme la Colombie ou le Mexique, le Brésil n’a jamais connu de fraude électorale, voilà qui pourrait limiter la marge de manœuvre de Bolsonaro en cas de contestation.