Remue-méninges
A qui profiteront les « rendez-vous de Béziers »?
21 avril 2016 à 14h00
Robert Ménard assure que « ce ne sera pas un marchepied » pour qui que ce soit
Du 27 au 29 mai, une partie de la droite va débattre. A l’initiative de Robert Ménard, des électeurs potentiels de la droite classique, du FN ou de Debout la France mettront au point un « programme de salut public ». Sans qu’on sache encore qui le portera en 2017. C’est tout le problème.
Ce sera l’heure de gloire de la « droite Valeurs actuelles », mâtinée d’un peu de Figaro : du 27 au 29 mai, Robert Ménard accueillera dans sa ville les« rendez-vous de Béziers ». Il semble avoir déjà réussi la moitié de son pari : des dizaines d’intervenants sont inscrits et il attend plus d’un millier de personnes. Pendant trois jours, ce sera remue-méninges permanent.
On retrouvera dans l’Hérault des déçus de la droite classique (Charles Beigbeder, Arnaud Dassier, Xavier Lemoine) ; des gaullo-chiraquiens repentis (Denis Tillinac, François Guillaume) ; les pasionarias de l’anti mariage pour tous (Béatrice Bourges et Ludovine de La Rochère) ; des experts (Thibault de Montbrial, Xavier Raufer), des intellos (Chantal Delsol, Alain de Benoist, Ivan Rioufol, Renaud Camus, théoricien du « grand remplacement »), des jeunes réacs à la mode (la journaliste Eugénie Bastié). Et même un ancien élu du Front national, Jean-Yves Le Gallou.
L’intitulé des débats donne le ton : « Economie : plutôt Thatcher, plutôt Colbert ? » ; « Libérer l’information, libérer le réel » ; « Passer au karcher l’école de mai 1968, on commence par quoi ? » ; « L’agriculture française est-elle viable sans vraie souveraineté ? ». Et, plus neutre (les débats le seront moins) : « Immigration : on fait quoi ? »
Débouché politique. Mais si Béziers promet d’être le rendez-vous d’une frange de la droite, son débouché politique reste pour l’heure illisible. Une fois les rendez-vous terminés, certains participants se tourneront vers les primaires des Républicains et du centre. D’autres, vers Marine Le Pen. D’autres, vers Nicolas Dupont-Aignan. Et Denis Tillinac continuera de penser que « le meilleur opposant à l’idéologie socialiste, c’est Eric Zemmour ». Un Zemmour qui ne figure pas (pas encore ?) sur la liste des inscrits.
Robert Ménard, élu maire de Béziers en 2014 après avoir réuni des membres du FN, de Debout de la France et des villieristes, rêve de réussir le même pari au niveau national. Le 29 mai, il veut présenter « 50 mesures patriotes pour ne pas se tromper de droite », qu’il décrit comme « un programme de salut public pour la France ». Impossible de lui en faire dire davantage : « On avance en marchant », répond-il en citant Mao. « On verra comment cela se traduira, comment les gens vont réagir. Je ne préjuge de rien. On tâtonne. Tout est ouvert. »
La liste des responsables politiques présents (et silencieux…) reste top secret. Marion Maréchal Le Pen ? Elle avait dit oui, mais on murmure qu’elle hésite. Nicolas Dupont-Aignan ? Il a reçu l’invitation mais n’a « pas encore pris sa décision ». Philippe de Villiers, qui pourrait mettre tout le monde d’accord derrière son panache vendéen ? Certains, prenant peut-être leur désir pour la réalité, confient qu’il « donne des signaux positifs » pour 2017. Sera-t-il à Béziers ? « Non », répond-il laconiquement par SMS.
Karim Ouchikh, membre du Rassemblement bleu marine via son mouvement, le SIEL, est aussi à la manœuvre. Persuadé qu’il existe « sur les flancs du Front national un espace politique considérable », il ira voir Marine Le Pen avec les propositions de Béziers. Déjà, lors du séminaire du FN en février, il avait plaidé avec Robert Ménard pour que le FN sorte du « ni gauche, ni droite ». En vain. Il reviendra donc à la charge, sans qu’on comprenne bien pourquoi la présidente du FN infléchirait sa position.
Mettre au point 50 mesures, soit. Mais derrière qui ? Robert Ménard affirme que Béziers « ne sera pas un marchepied » pour qui que ce soit. D’ici 2017, il faudra pourtant choisir et Robert Ménard le sait bien : « Je ne suis pas un vieux con, quand même ! », s’exclame-t-il d’ailleurs au milieu de la conversation.