À Bordeaux, des militants d’extrême droite attaquent une conférence de LFI
Une vingtaine de personnes cagoulées et armées de barres de fer ont tenté de pénétrer dans un amphithéâtre de l’université Bordeaux-Montaigne où se tenait une réunion publique avec les députés insoumis Carlos Martens Bilongo et Louis Boyard. La police est intervenue sans procéder à des interpellations. L’établissement, ainsi que les deux députés, vont porter plainte.
Christophe Gueugneau, Médipart, 8 décembre 2022 à 17h38
Et« Et tout le monde déteste les gauchistes ! » entonné par une vingtaine de personnes cagoulées, munies de barres de fer ou de matraques télescopiques, une pancarte « Qu’ils retournent en Afrique », des invectives et des coups de pression. Mercredi 7 décembre au soir, sur le campus de l’université Bordeaux-Montaigne, à Pessac (Gironde), des militants d’extrême droite ont tenté de perturber la réunion publique organisée par les deux députés La France insoumise (LFI) Carlos Martens Bilongo et Louis Boyard.
La réunion publique, organisée dans le cadre d’une conférence intitulée « La LFI-NUPES débarque dans ta fac », afin d’échanger sur les conditions de la vie étudiante, qui rassemblait une centaine d’étudiant·es dans un amphithéâtre, avait commencé vers 18 h 30. Les militants d’extrême droite sont arrivés peu avant 20 heures.
Après quelques affrontements avec le service d’ordre, ils n’ont pas pu pénétrer dans le bâtiment. Appelées par l’université, les forces de l’ordre sont intervenues vers 20 heures pour disperser ces manifestants, sans procéder à des arrestations.
Vers 21 h 30, le même groupe a semble-t-il tenté, une fois encore sans succès, de perturber une représentation théâtrale qui se tenait également sur le campus. La police est à nouveau intervenue. Dans un communiqué diffusé jeudi, le président de l’université Bordeaux-Montaigne, Lionel Larré, parle d’une « vingtaine d’individus cagoulés, armés de barres de fer et proférant des slogans racistes ». Il affirme que l’université « condamne avec la plus grande fermeté ces violences et tentatives d’intimidation à l’encontre d’élus de la République, de l’université, de la liberté de débattre en toute sécurité, et de la culture ».
Les deux députés, Carlos Martens Bilongo et Louis Boyard, ont également diffusé un communiqué dans lequel ils dénoncent une « expédition punitive » menée par des « militants d’extrême droite ». « Des membres du service d’ordre ont été blessés », ajoutent les deux élus. Ils demandent au ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, « une réaction à la hauteur de cette attaque ».
Plainte
Ce dernier a réagi sur Twitter, en jugeant « inacceptable » cet événement mais sans faire référence à l’appartenance politique manifeste des fauteurs de troubles : « La liberté d’expression est une liberté fondamentale et ce qui s’est passé est inacceptable. J’invite les parlementaires à déposer plainte s’ils ne l’ont pas fait », a écrit Gérald Darmanin.
L’université a confirmé jeudi en fin d’après-midi à Mediapart qu’une plainte allait être déposée « dans la soirée ou demain matin » au nom du président, Lionel Larré. Les deux députés insoumis vont également porter plainte.
La section LFI de Gironde a déploré dans un communiqué que trois personnes aient été « légèrement blessées » parmi ses militants. Dans son texte, elle demande au gouvernement de « poursuivre et dissoudre ces groupuscules » d’extrême droite et ajoute : « Cette tentative d’intimidation et les menaces ouvertes de les réitérer à chacune de nos manifestations démocratiques sont inacceptables et doivent nous alerter tous. »

Dans un communiqué unitaire rapporté par Sud Ouest, plusieurs organisations politiques et syndicales dont Le Poing Levé, les Jeunes Insoumis·e·s, SOS Racisme, les Jeunes Écologistes, les Jeunes Socialistes, SUD PTT ou encore CGT Magna, ont également condamné cette action. Un appel à rassemblement est prévu vendredi 9 décembre à 12 h 30 sur le parvis de l’université Bordeaux-Montaigne pour « montrer à l’extrême droite qu’elle n’a pas sa place à la fac et ne sera jamais la bienvenue ».
Lundi dernier, deux militants locaux de LFI avaient déjà été pris à partie par des individus d’un groupuscule d’ultradroite à Lyon (Rhône) et avaient été frappés. L’un d’eux a eu un traumatisme crânien, l’arcade sourcilière ouverte, et présente de multiples ecchymoses. Des militants, dont une personne âgée, ont été agressés alors qu’ils tractaient dans le Vieux-Lyon. Une enquête a été ouverte et confiée à la direction départementale de la sécurité publique.
Le maire de Lyon, Grégory Doucet, a indiqué avoir saisi la justice, apportant son soutien aux victimes et appelant « de nouveau à dissoudre ces groupuscules et fermer les locaux ». Le groupuscule identitaire des Remparts est particulièrement visé. Lundi soir, la préfecture du Rhône avait décidé d’interdire la manifestation qu’ils avaient prévu d’organiser le 8 décembre en marge de la traditionnelle montée aux flambeaux. Dix députés de la majorité ont en outre écrit au ministre de l’intérieur pour demander la dissolution du groupe et la fermeture des lieux qu’il fréquente. Une demande déjà faite en octobre par le maire de Lyon.